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Comment (et pourquoi) s’échauffer au saxophone

Comment (et pourquoi) s’échauffer au saxophone
Saxophoniste norvégienne, Aina Helgeland Davidsen nous plonge au cœur de l'art des échauffements musicaux, afin de les aborder avec une nouvelle perspective et d'explorer leurs véritables avantages. Premier prix du Stockholm International Music Competiton 2017, Aina a sorti son premier album "THEN" en 2021, et a composé sa propre musique pour l'album "Å Overleve Tanken" la même année. Elle se produit également avec des orchestres et enseigne dans des écoles de musique, tout en travaillant comme coach et professeur de Timani pour des musiciens professionnels.

À quoi ça sert ?

Lorsque j'étais jeune musicienne, les professeurs et les adultes me répétaient sans cesse de ne pas oublier mon échauffement et de prendre du temps pour jouer les notes les plus longues... et la question intérieure revenait sans cesse : "Pourquoi ? Cela sert juste à chauffer mon saxophone, j'ai d'autres choses plus importantes à pratiquer..."

La pratique est un art, elle est sous-estimée par rapport à tant de gens qui parlent de "talent". Si ce n'était que du talent, pourquoi devrions-nous nous entraîner pour nous améliorer, et pourquoi diable devrions-nous nous échauffer ? À la question « qu’est-ce que l’échauffement et à quoi sert-il ? », la plupart des étudiants répondent : pour chauffer les instruments, ou pour pratiquer le son. Ce n'est pas une mauvaise réponse, mais je pense qu'il y a beaucoup plus à explorer !

The Talent Code

Ce qui est extrêmement important, c'est de souligner que devenir musicien et en vivre, c'est un travail à plein temps, un travail acharné. Et de très bonnes habitudes constantes en ce qui concerne la pratique en font partie. Un jour sans pratique peut vous faire reculer de trois pas par rapport à la veille. (Conseil de lecture : The Talent Code, par Daniel Coyle).

 

À chaque exercice son objectif

Chaque exercice d'échauffement a une cible et un but, c'est votre entraîneur personnel et un très bon ami si vous apprenez à le connaître, et si vous êtes curieux de savoir ce qu’il peut réellement faire pour vous et avec vous.

La question est de savoir si vous êtes bien éveillés pendant votre séance d'échauffement. Vos oreilles sont-elles bien actives, à l’affût des améliorations ? Sur quoi vous concentrez-vous ? Si vous vous échauffez sans avoir d'objectif en tête, à quoi vous améliorez-vous ?

échauffements au saxophone

L'une de mes citations préférées est la suivante : “Ce que nous pratiquons est ce que nous améliorons”.

Est-ce que vous jouez des études sans les phraser correctement ? Est-ce que vous faites des gammes techniques sans prêter attention au rythme ? Si vous êtes sûrs à 100% qu'il n'y a RIEN à améliorer dans l'un de vos exercices d'échauffement, y a-t-il alors une nouvelle façon de pratiquer la technique ? Y a-t-il quelqu'un qui possède une compétence différente de la vôtre en matière de technique et, surtout, comment pouvez-vous l'apprendre ? Cette personne s’entraîne-t-elle d’une autre manière ?

C'est en pratiquant que l'on devient expert, donc si vous pratiquez sans vos oreilles et vos objectifs, vous deviendrez un expert dans l’art de ne pas savoir comment vous avez appris des choses, et l’art de ne pas savoir contrôler quand activer vos techniques pour des morceaux plus importants, ou sous la pression. Ce qui limite souvent notre pratique de l'échauffement, à mon avis, c'est notre propre boîte de connaissances, notre propre bibliothèque d’exercices. En explorant et en cultivant notre curiosité pour de nouveaux exercices d'échauffement, nous continuons à nous améliorer et nous remplissons notre bibliothèque interne.

 

Apprendre des autres

L'une des nombreuses choses que le monde des musiciens et de la musique m'a apprise, c'est qu'on peut toujours apprendre de quelqu'un.

Il y aura aussi toujours quelqu'un qui essaiera de vous faire sentir comme un raté, et bien trop peu de gens qui se soutiennent les uns les autres, qui s'entraident et qui apprennent des compétences différentes les uns des autres lorsqu'ils étudient. Beaucoup ont cette idée qu’il faut enterrer tout le monde pour être sûr d'arriver au sommet ! Que diriez-vous plutôt de la réflexion : "Wow, tu as joué cela d’une façon incroyable, je l'ai pratiqué pendant si longtemps… Comment l'as-tu appris ? Peux-tu me dire dans les moindres détails ce que tu fais pour réaliser cette technique de cette manière ?".

Vous avez alors un nouvel exercice d'échauffement, une nouvelle façon d'apprendre une technique et un nouveau collègue heureux - qui pourrait vous demander de l'aide à un moment ou à un autre... !

Exercices saxophone

Dans le pire des cas, sachant que nous sommes tous et toutes des personnes différentes dans des corps différents, vous avez appris que ce qui a fonctionné pour cet étudiant n'est pas quelque chose qui a fonctionné pour vous (en considérant que vous avez consacré suffisamment d'heures à l'exercice pour pouvoir dire que vous l'avez essayé correctement).

 

Quelques outils pour pratiquer

 

Varier l'ordre et la manière

Qu'est-ce qui semble toujours être “difficile” dans vos morceaux de musique, vos représentations, vos leçons ou vos séances d'entraînement ? Une fois que vous avez trouvé, posez-vous la question suivante : à quelle fréquence pratiquez-vous pour améliorer cette difficulté, et pratiquez-vous toujours de la même manière et dans le même ordre ?

Permettez-moi de vous donner un exemple : vous pratiquez chaque jour vos notes longues pour votre entraînement, avec le même exercice dans le même ordre. Il est très probable que vous perdiez votre concentration au même endroit à chaque fois que vous vous entraînez, et que vous perdiez la qualité des tonalités pendant les exercices.

Les scientifiques indiquent que nous perdons notre concentration après 15-20 secondes, ce qui signifie que si vous commencez toujours vos sessions avec les mêmes exercices/pièces, la même concentration et les mêmes techniques, vous continuerez à commettre les mêmes erreurs. Si vous n'y prêtez pas attention, vous ne serez jamais en mesure de maîtriser la durée de votre attention et de votre concentration. Il n'est pas étonnant que vous soyez un expert dans les premiers exercices, et que vous rencontriez des difficultés vers la fin...

Prendre du recul

Posez-vous cette question après un passage joué ou pratiqué : que dirait mon professeur actuel ou précédent ? Serait-il satisfait ou non ? Quelles seraient ses suggestions d'amélioration ? Comment puis-je pratiquer cela, y a-t-il une nouvelle façon de m’y intéresser ? Est-ce que je connais quelqu'un qui pourrait m'aider ?

Vérifier votre concentration

Faites régulièrement le point pour vérifier que vous n'avez pas perdu votre concentration. Posez-vous les questions : Est-ce que je sais ce que je viens de jouer ? Est-ce que j'ai entendu chaque détail du son et de la technique ? Est-ce que je sais ce qui doit être amélioré ?

Si vous doutez, suivez la règle de TOUJOURS répéter le passage, puis notez quelques points d'amélioration. Répétez le passage, par petites parties, et lorsque vous y parvenez correctement répétez-le encore trois fois, et revenez-y toujours pour le mémoriser et le consolider. Ce que nous pratiquons est ce que nous améliorons, si vous pratiquez mal 10 fois et une seule fois correctement, les chances statistiques que votre cerveau se souvienne de cette fois et choisisse cette connexion plutôt que les 10 autres avec les mêmes erreurs sont faibles…

Travailler ce qui fait le plus peur

Qu'est-ce qui me fait peur dans les aspects techniques ? Quels sont les grands saxophonistes qui sont incroyablement doués pour quelque chose que je “sais” que je ne serai “jamais” capable de faire ? C'est quelque chose que vous pouvez pratiquer ! Effectuez des recherches et trouvez trois nouvelles méthodes d'entraînement sur cette technique en particulier. Entraînez-vous régulièrement pendant 3 à 4 minutes, et répétez. Changez le moment où vous la répétez, afin de stimuler votre concentration.

Faire des pauses

Si vous ne parvenez pas à vous concentrer, si vous vous assoupissez et si vous n'arrivez pas à vous retrouver, faites une pause de 5 à 15 minutes. Vous êtes humain et c'est tout à fait normal ! En fait, c'est même le moment où notre cerveau stocke physiquement et sauvegarde l'information. Mon meilleur conseil est de pratiquer maximum 45 minutes, puis de faire une pause de 15 minutes. C'est le meilleur intervalle d'entraînement que j'ai jamais essayé, et je l'utilise tous les jours. C'est la garantie que ma tête n'explose pas avant la fin de ma pratique. Les pauses sont vitales et très efficaces, et il est important d'écouter notre corps ! D’autre part, la plupart d'entre nous ont besoin de plus de sommeil que ce que nous imaginons ; essayez de vous accorder quelques heures supplémentaires pendant la nuit, et voyez si cela fait une différence.

Varier les exercices

Si vous vous échauffez avec TOUT chaque jour, il se peut que vous n'ayez pas le temps de faire autre chose, et vous n'aurez pas la concentration ou l'énergie nécessaire pour apprendre quelque chose de l'échauffement, ou pour être capable de l'utiliser à l'avenir. Vous risquez alors de repartir de zéro tous les jours.

Mon meilleur conseil en matière d'échauffement est donc de choisir 3 à 4 exercices différents chaque jour au maximum, avec des objectifs différents, afin de garder l'esprit occupé et intéressé.

Lorsque nous nous produisons, pratiquons et jouons, nous avons (bien sûr) besoin de notre corps. Ce que j'aime faire, c'est varier entre des exercices physiques et mes exercices d'échauffement pour garantir que mon corps travaille de concert avec mon instrument et moi. Jouer assise sur le sol, assise en tailleur, allongée, debout sur un coussin d'équilibre ou en utilisant les exercices de Timani.

Timani est une méthode basée sur l'anatomie, qui permet aux musiciens de travailler sur la coordination musculaire de leur corps pendant qu'ils jouent ou s'entraînent, et qui comprend des exercices spécialement conçus pour les musiciens. Les exercices et les connaissances anatomiques apprises aident à comprendre et à surmonter les défis liés à la douleur, aux blessures, aux problèmes techniques, à la production de son ou même simplement à améliorer son jeu.

Soyez conscient et curieux de votre concentration, de sa durée et de vos objectifs pour chaque pratique. Si vous avez besoin d'une pratique pour vous détendre, laisser aller les pensées, et simplement jouer sans but - alors faites-le avec cela à l'esprit et comme objectif.

Le fait est que lorsque vous changez d’exercice et que vous restez concentré sur les objectifs, vous réalisez quelque chose à chaque séance d'entraînement. Vous continuez à avoir un sentiment de bien-être à chaque fois que vous vous êtes “simplement” échauffé, avec une mission et un objectif. Si cela peut vous aider, vous pouvez noter tous les exercices que vous connaissez dans un petit carnet, liés à différentes compétences, et voir combien vous pouvez en faire pendant une semaine ou deux.

Gardez la curiosité d'un enfant et voyez si vous connaissez quelqu’un qui a quelque chose à vous apprendre. Vous êtes unique, il n'y a personne d'autre que vous dans le monde qui vous ressemble. Cela peut sembler cliché, mais cela signifie que vous avez quelque chose que personne d'autre n'a, trouvez-le et enrichissez le monde avec - et ouvrez vos yeux et vos oreilles aux autres - qu'est-ce qu'ils ont d'unique ?

 

Ce n'est qu'un tout petit aperçu de l'énorme sujet qu'est l'échauffement. Utilisez-le et partagez-le.

Appréciez votre échauffement - c'est comme les carottes et les brocolis, ce n'est pas toujours le premier choix, mais c'est toujours sain pour vos progrès et votre développement !

 

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