The Sound and me #23 avec David El Malek
S'occuper de soi-même
« Quand j'ai commencé à m'intéresser à la musique, je crois que je n'étais pas... Je n'étais pas très bien dans ma peau. Et il a fallu s'occuper de soi-même déjà. Donc parler, beaucoup parler. Être à l'aise avec sa propre voix, c'était déjà un sacré pas de franchi pour le futur musicien que j'allais devenir.
Les bouquins, ou les professeurs qu'on avait, disaient : il faut souffler comme ça, il faut faire ci, il faut faire ça. Ça ne marchait pas. Enfin, si, ça marchait, mais je n'arrivais pas vraiment à exprimer ce que j'avais dans la tête, c'est à dire un truc qui était relié à ma propre vie, une émotion... Pas une émotion musicale, mais un truc qui vibre, qui vous fait vibrer. Ça n'a rien à voir avec l'art, mais ça va le devenir, quelque part. C'est ce qui va faire qu'à un moment donné on va trouver une voie, peut-être. C'est long. Le chemin est long et donc je continue à chercher, à régler certaines choses... Bien se sentir, avoir un rapport sain avec soi même, physique et mental, pour pouvoir exprimer quelque chose via un instrument.»
Poétiser sa propre histoire
« C'est comme si j'essayais de poétiser ma propre histoire. Me dire : finalement, c'est pas mal, c'est mon histoire. Ce n'est pas du jazz, ce n'est pas du classique, je ne sais pas ce que c'est. Je joue et à l'intérieur, je me vois dedans. Et puis je me dis : tiens, c'est pas mal. Parce que quand on se dit que c'est pas mal, ça nous permet de continuer à croire en nous mêmes.
Et donc oui, pour moi, ça passait d'abord par une réconciliation avec soi même. C'est un peu la base du son. Parce que quand j'étais enfant et que j'écoutais la 40ᵉ de Mozart, je me disais... C'est trop. Trop d'émotions. C'est impossible d'atteindre ça. Et donc quand on est là avec son saxophone, on se dit : qu'est-ce que je vais raconter, finalement ? Ce n'est pas une mince affaire de faire plaisir aux gens, parce que c'est ça qu'on fait. On joue pour les gens. Et je crois que je ne joue pas pour les gens, moi. C'est triste, mais je crois que je joue pour moi même.»
Chercher et non pas produire
« Je me fous royalement de la technique, au sens le plus large possible, c'est à dire l'émission du son, les doigts... ça, je m'en contrefous. Aujourd'hui, avec le temps, avec 30 ans de recul, je me dis bon, il a fallu ça pour pour se dire : finalement, avec peu de notes et peu de technique, on peut dire quelque chose. Et ce que je veux dire, ce n'est pas forcément un truc artistique. Je veux juste me sentir bien.
Ce qui me fait vibrer, c'est vraiment de chercher et non pas de produire quelque chose, au sens artistique, faire un projet, un disque, un morceau... Ce qui m'intéresse, c'est de me dire: tiens, j'ai fait ça, j'ai travaillé cette gamme, j'ai travaillé tel passage ; qu'est ce qui vient réconcilier ce que je suis ? Et je crois qu'il n'y a que ça qui m'intéresse dans la musique.»
Oublier tout ce qu'on apprend
« C'est comme au yoga, quoi. À un moment donné, il y a tout qui lâche, ça lâche complet. Et donc, quand on a un certain répertoire, on ne se lâche pas, on ne se lâche pas du tout. Au contraire, on est rivé sur ce qu'on doit jouer, c'est un savoir-faire. Et donc moi, ce qui m'intéresse ce n'est pas ça, c'est justement d'oublier tout ce qu'on apprend. Parfois je me demande si on ne pourrait pas se lancer directement dans le son et y aller carrément. Sans préparation. Alors d'un point de vue business, je pense que ça n'intéresserait pas grand monde. Mais pourquoi pas ? C'est peut être une voie à creuser...»
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