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The Sound and me #10 avec Baptiste Herbin

The Sound and me #10 avec Baptiste Herbin
Dans ce nouvel épisode, le jazzman Baptiste Herbin s'interroge sur son rapport au son. Comment acquiert-on un son ? Qu'est-ce que le son 'Baptiste Herbin' ? De quels choix et volontés relève-t-il ?

Prendre possession d'un son

Souvent, lorsqu'on sort d'un concert, le public va vous parler de votre son en premier lieu avant de vous parler de musique ou de votre technique, ce qui est quand même assez intéressant...

Le son, ça fait partie d'un choix. On peut le comparer à la voix : on ne peut pas la changer, mais on fait quand même des choix dès l'enfance en prenant exemple sur nos parents, nos proches et nos amis. On prend aussi possession d'un son, on apprend à acquérir ce son, avec une certaine éducation.

Par exemple, au début, je voulais faire du ténor, et l'arrivée du son dans mes oreilles de Maceo Parker a fait que je suis resté à l'alto parce que ce son-là qui est indéfinissable, avait des résonances en moi et des émotions qui m'ont décidé à continuer l'alto et à soutenir et à présenter cet instrument.

Les autres caractéristiques de son c'est que j'aime autant Paul Desmond que Charlie Parker, Cannonball ou même Ornette Coleman, parce qu'ils sont complémentaires et parce qu'on arrive à différentes émotions. Je crois que son choix personnel se fait en fonction de tous ces exemples, en fonction de ce qu'on écoute au quotidien.

Et finalement, je pense qu'avoir son propre son, c'est se révéler soi-même aux gens et se dire : voilà, je suis Baptiste Herbin, ou je suis un tel ou un tel, je suis comme ça, et mon son est représentatif, c'est mon identité.

 

Le son Baptiste Herbin...

Je ne sais pas s'il y a un son Baptiste Herbin, mais en tout cas, ce que je ressens et ce que je veux - c'est toujours une question de choix en musique et surtout dans la musique improvisée comme le jazz - je veux un son puissant, large, centré en même temps, un son pas forcément fort, mais quelque chose qui va loin.

C'est à dire je veux répandre mon timbre et je veux aussi avoir plusieurs dynamiques. Je veux pouvoir pleurer avec mon sax, je veux pouvoir crier, je veux pouvoir rire. Je veux pouvoir avoir les mêmes sensations que si j'étais en train de m'exprimer en chantant, vraiment comme un porte-parole, un portevoix. Le saxophone va opérer dans ce rôle-là.

Ce son-là se travaille aussi avec une certaine couleur et une certaine patte. Il va se travailler aussi avec un certain matériel, mais c'est surtout lié à ce qu'on a mentalement en tête. C'est lié à notre éducation. Si on écoute beaucoup Charlie Parker, Cannonball, Lee Konitz ou Paul Desmond, toutes ces couleurs de sons très différentes vont faire notre éducation et on va essayer d'en faire une synthèse. Cette étape, je l'appelle le copiage et l'éducation. Quand on est enfant, pour apprendre à parler, on écoute nos parents. J'estime que, étant jeune musicien, on écoute les grands avant de pouvoir trouver sa propre voix. Et ça, c'est essentiel pour trouver sa propre voix, à moins qu'on soit un génie comme certains qui n'ont pas eu besoin de passer par cette étape, il y en a. Moi je pense que j'ai dû passer par cette étape, et après, on arrive à en faire une certaine synthèse pour réussir à trouver sa propre patte. Enregistrements après enregistrement, on arrive à faire ses choix et avoir aussi sa propre couleur, ses propres dynamiques.

 

Un son universel

L'autre chose, pour finaliser sur cette idée du son personnel, c'est que je veux un son qui soit universel. C'est très difficile à obtenir. C'est à dire que je veux pouvoir jouer tous les styles de musique qui sont offerts à moi, et avec des musiciens que j'ai la chance de rencontrer, que ce soit de la musique des Balkans, de Madagascar, du Brésil, du Mexique, que ça soit plusieurs projets en jazz, que ça soit du big band, ou du trio, que ça soit du soprano ou de l'alto. Je vais penser la même chose quand je vais jouer de la flûte ou de la valiha malgache. Ça va être toujours la même chose.

Et d'ailleurs, même quand je travaille à la maison, même quand je travaille des gammes ou des choses qui peuvent être rébarbatives, je vais toujours me focaliser sur cette chose essentielle qu'est le son et toujours essayer d'avoir un son qui puisse s'adapter à tous les registres et toutes les situations possibles.

 

 

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