Jazz

Eric Seva

Eric Seva

Son goût pour la découverte, Eric Seva le doit à un père musicien, qui gagne sa vie à l'usine en semaine et se métamorphose en chef d'orchestre dans les bals populaires le weekend. La musique est si bien présente dans le quotidien d'éric que l'apprentissage d'un instrument survient comme une évidence lorsque son père lui offre une flûte à bec en 1969, à l'âge de cinq ans.

L'apprentissage du saxophone suit au milieu des années 1970. Le goût des croisements, le sens aigu de la mélodie et la maîtrise des couleurs, c'est à cette époque fertile qu'éric les doit. Le weekend, il fait danser le public des bals populaires avec l'orchestre familial tout en suivant des études classiques poussées à l'école normale de Musique de Paris.

Loin de renier l'univers de la musique populaire, éric y voit une force de communication avec le public, une inspiration qui ne cessera jamais d'alimenter ses dons de raconteur d'histoire. Cet appétit le conduit vers le jazz au sortir de l'école, sous la protection d'un voisin et ami, le dessinateur Jean Cabu, qui sera pour lui un catalyseur artistique. Toute aussi décisive est sa rencontre avec Dave Liebman qu'il rejoint à New York en 1990 pour devenir son élève, et qui lui enseigne le goût de cultiver sa différence.

Séva ne s'est jamais départi de cette règle depuis. Si les musiques improvisées sont sa priorité créative, ainsi que l'illustre son séjour au sein de l'Orchestre National de Jazz de 2005 à 2008, il n'a jamais renoncé au plaisir de la découverte en participant à l'enregistrement de plus d'une centaine d'albums porteurs de signatures aussi diverses que Didier Lockwood, Chris Réa, Thomas Fersen, David Krakauer, Céline Dion et Henri Salvador, Michel Legrand, Sylvain Luc, Khalil Chahine, ou encore Zaz avec laquelle il effectuait récemment le tour du monde.

Et si éric a toujours privilégié dans son parcours le jazz et sa musique source, le blues, c'est précisément parce que le métissage et la liberté en sont l'essence même. Première manifestation de cette ouverture, l'album Folklores imaginaires lui permet en 2005 d'aborder la composition de la même façon que l'improvisation, au rythme de la danse intérieure qui l'anime. Le recueil Espaces croisés, célébré par toute la profession, prend le relais quatre ans plus tard. éric y pratique l'art de l'audace en travaillant aussi bien la palette sonore des saxophones que la projection du son.

Les projets se sont enchaînés depuis : Danse avec BartókConfluence (une commande d'écriture pour quartet de jazz et grand orchestre classique), l'album Nomade sonore (2015) dont chaque note raconte le besoin d'itinérance de son créateur ; Body & Blues (2017), une conversation avec le blues, par-delà les cultures, avec la caution vocale de Harrison Kennedy, membre original du groupe de soul Chairmen of the Board, qui renoue depuis le début du millénaire avec ses racines en conjuguant blues originel et discours social actuel.

Cette rencontre fertile pousse aujourd'hui éric au dépouillement apparent de TreeO, son dernier projet en date réalisé en collaboration avec le claviériste Christophe Cravero et le batteur/percussionniste Zaza Desiderio. Par son approche mélodique, ce travail ouvre la voie à ce qui sera bientôt l'aboutissement d'une décennie féconde : Mother of Pearl, un croisement entre son saxophone baryton et l'accordéon de Daniel Mille, inspiré par l'expérience du « Tango Nuevo » de Gerry Mulligan et Astor Piazzolla.

À l'image du rêve, la musique d'éric Séva est un condensé d'imaginaire qui autorise ce partenaire essentiel qu'est le public à voyager librement dans son sillage. Avec un bonheur jouissif constamment renouvelé.

Biographie écrite par Sebastian Danchin
Crédit photo : Philippe Marzat

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